Le transfert de compétences au Laos : un long processus, récompensé

Sous l’impulsion du Pr Hélardot, le programme de Chirurgie Pédiatrique naît au Laos

En 2010, le Pr Hélardot prend sa retraite laissant derrière lui une grande carrière hospitalière. Durant 10 ans, il dirige le service de Chirurgie Pédiatrique viscérale de l’hôpital Trousseau à Paris, après avoir supervisé tout aussi longtemps celui de l’hôpital Saint Vincent de Paul. Et, c’est alors qu’il s’apprête à quitter ses fonctions hospitalières, qu’il croise le chemin de La Chaîne de l’Espoir…

C’est au détour de son pot de départ que l’un des anesthésistes du service dans lequel il opérait, le Dr Mounsaveng, lui demande d’aider son pays d’origine : le Laos. Une région montagneuse, qui dénombre alors plus de 6,5 millions d’habitants, dont 67 % vivant en milieu rural. Une situation démographique complexe à laquelle s’ajoutent de faibles ressources, expliquant en partie, le haut taux de mortalité néonatale dont est victime sa population. En effet, en moyenne au Laos en 2012, à la suite de 1 000 naissances, 57 nouveaux nés décèdent avant leur 28ème jour. Des chiffres alarmants, plus de 20 fois supérieurs à ceux observés en France, qui trouvent également leurs origines dans l’absence d’une réelle formation à la chirurgie pédiatrique dans l’ensemble du pays. Alors, devant ce triste constat, lorsque son ancien collègue lui demande son aide, c’est immédiatement que le Pr Hélardot accepte.

Pour mener à bien cette mission, une consœur le redirige vers le Pr Deloche et, de façon plus générale, vers La Chaîne de l’Espoir. C’est ainsi que débute la coopération entre le Pr Hélardot et l’ONG. 

Ensemble, ils vont œuvrer à apporter leur aide aux enfants malades et à améliorer le système de santé laotien.

Pierre Hélardot

Au fil des missions, les équipes laotiennes gagnent en autonomie

Un an après avoir croisé la route de La Chaîne de l’Espoir, le Pr Hélardot effectue en 2011, en compagnie de son pair le Dr Mounsaveng, une mission exploratoire. Celle-ci a pour but d’évaluer l’état de la chirurgie pédiatrique dans le pays et de déterminer quelles structures hospitalières sont à même d’héberger cette activité. Rapidement, leur choix se porte sur la capitale Vientiane, ainsi que sur deux capitales provinciales, Thakhek au sud, et Luang Prabang au nord. En septembre 2013 débutent les activités de La Chaîne de l’Espoir au Laos (principalement à l’ancien Hôpital Mahosot puis au nouvel hôpital pédiatrique, le Children’s Hospital), avec un double objectif : former et soigner.

Cependant, compte tenu du temps passé chaque année dans le pays, environ deux mois par an, il apparaît rapidement au Pr Hélardot et à ses confrères de La Chaîne de l’Espoir, qu’il leur sera impossible d’assurer l’enseignement de la discipline à tous les jeunes chirurgiens en formation de chirurgie générale. Alors, afin d’optimiser leurs interventions, ils établissent une stratégie : former à l’activité pédiatrique un chirurgien déjà confirmé et intéressé par la spécialité, à charge pour lui ensuite de développer ultérieurement cette branche médicale et son enseignement dans tout le pays. Un pari gagnant.

En effet, à son commencement, le programme était rythmé par quatre missions de formation par an (de 2 à 3 semaines) durant lesquelles, une trentaine d’enfants bénéficiaient d’une consultation et une vingtaine d’autres jeunes patients, d’une opération. Aujourd’hui, La Chaîne de l’Espoir n’organise plus que deux missions annuelles au Laos, qui visent principalement à la prise en charge d’enfants aux pathologies les plus complexes. Car, depuis leur mise en place en 2013, les 18 missions entreprises par l’ONG ont permis à l’équipe laotienne d’acquérir de véritables connaissances et savoir-faire dans le domaine de la chirurgie pédiatrique, donnant lieu à une quasi autonomie. Point d’orgue de ce transfert de compétence, l’organisation en 2015 à Vientiane, avec l’aide du Dr Vongphet, du 10ème congrès de Chirurgie Pédiatrique des pays de l’A.S.E.A.N.. (Association des nations de l'Asie du Sud-Est). Un événement qui a largement contribué à réduire l’enclavement relatif à cette discipline dont souffrait le pays.

Congrès A.S.E.A.N

Le transfert de compétences, un cercle vertueux

Lors d’une mission en février 2020, les Pr Grapin, Bachy et Hélardot effectuent plusieurs brefs séjours d’étude à l’hôpital de Luang Prabang, une grande ville à la conjoncture des vallées qui entaillent les montagnes occupant tout le nord du pays. Des régions très pauvres en moyens médicaux dont proviennent de très nombreux enfants pris en charge à Vientiane, qui n’ont pour l’heure, d’autres choix que de parcourir des centaines de kilomètres pour être soignés. Les trois médecins constatent alors l’importance et la nécessité d’améliorer a minima la prise en charge initiale de ces petits patients, préalablement, si nécessaire, à leur transfert vers la capitale.

Lors de cette même mission, après avoir opéré sa formation deux mois par an, les professeurs estimèrent que l’enseignement reçu par le Dr Vongphet en matière de Chirurgie Pédiatrique était satisfaisant, le rendant autonome et apte à former d’autres chirurgiens à la spécialité pédiatrique. Un sentiment qui sera conforté durant leur dernier séjour, lorsqu’ils apprennent avec surprise que le Dr Vongphet a lui aussi pris l’initiative de passer quelques jours dans l’hôpital de Luang Prabang. Accompagné d’un anesthésiste pédiatre également formé par La Chaîne De l’Espoir, le docteur laotien s’est rendu sur place afin de prendre contact et d’évaluer les moyens disponibles, avant d’organiser des enseignements sur la prise en charge d’urgence des enfants et des nouveau-nés.

Une décision spontanée, qui a confirmé aux yeux de ses homologues français, que le Dr Vongphet était bel et bien passé au niveau magistral de son métier. Un avis partagé par la Faculté, qui l’a nommé en octobre 2020, responsable de la Chirurgie Pédiatrique pour l’ensemble du Laos.